C'était une fin d'après-midi de mai. En mai, il est censé faire beau, mais cette année, il semblerait que le printemps avait du mal à pointer le bout de son nez. Il se faisait attendre, le coquin, distribuant les rayons de soleilau compte-goutte, par-ci par là, un jour de lumière, tous les autres de la semaine pluvieux. Changement climatique ou non, elle en avait ras le bol de ce voile qui semblait être tombé sur Toulouse, comme un espèce de filtre photo en noir et blanc qui avait le don de teinter la vie d'un accent morose. 

Cet après-midi elle se retrouvait donc à traîner derrière elle comme un boulet ce manque d'entrain, d'appétence qui en fait ne s'apparentait pas qu'au temps, mais à sa vie toute entière. 

Et voilà qu'elle reçu un appel, appel à la vie. C'était une amie, au bout du fil. Ou plutôt une voisine qui avait, il se trouve, besoin d'aide pour déplacer un meuble trop lourd pour son dos, que l'âge avait érodé. Et voilà qu'elle décuvrit cet endroit de nulle part, cet endroit un peu bizarre et en même temps si familier, dont beaucoup de personnes âgées ont le secret. Mme Michu ne dérogeait pas à la règle des petites poupées dans des vitrines où étaient empilées des assiettes qui servaient une fois l'an pour le repas du 25 décembre à midi et le repas d'anniversaire. 

Des petites poupées agrémentées de leurs naperons brodés prenant peu à peu la poussière au fil des visites de plus en plus espacées de la famille et des amis. Le canapé lui aussi était presque entièrement recouvert de naperons de tailles néanmoins plus grandes, prêt à acceuillir n'importe quel individu s'aventurant dans l'antre de la vieille dame. Canapé suivi de près par sa table en bois vernie et sculptée, dont les pieds avaient subi les affres de Roufiot, le chien de Mme Michu et dont la niche ne se tenait pas loin non plus du canapé. Les portraits aux aussi se tenaient les uns à côté des autres sur le mur opposé, toute cette marmaille se tenait chaud dans la mémoire de Mme Michu, entre les ailleux, les parents, les enfants et les petits enfants. Une promiscuité qui avait tout d'une petite maison de poupée dans laquelle il faisait bon de retrouver Mme Michu, le temps d'un café.