Ce soir là était le soir de tous les soirs. Ils s'étaient donné rendez-vous sur les quais. 

Ce soir était le soir de tous les soirs, elle s'était donné pour mission de l'embrigader. 

Non, le topo ne serait pas chiffré. Mais décidée, elle l'était. 

Ce soir, elle lui avouerait. Elle lui dévoilerait enfin ce qui dans son cœur, bouillonnait. 

Lui qui n'avait d'yeux que pour le sexe et le divertissement,

Dissimulant derrière d'épaisses lunettes un esprit brillant.

Aveugle, myope de la beauté, pourtant. 

Elle lui dirait dans un sourire éclatant, 

Sans sous-entendu, comme à l'accoutumée, 

Ce qu'elle pensait de son intelligence bafouée, 

Par de la poudre blanche dans le nez. 

Poudre d'escampette, il prendrait. 

La durée dans sa vie à lui lui était comptait.

Pas dupe, elle le savait, 

Sacrifiant sa fierté. 

Papillon éphémère venu le troubler, 

Ombre-guide en des temps délités. 

Leur temps leur était compté, 

Car bientôt, elle foutrait tout en l'air. 

Ce soir, il n'aurait plus l'autorité. 

Celle qu'il avait prise, en temps mâle issu d'une culture traditionnelle. 

Ce soir, il ne l'aurait plus, le temps d'une ritournelle. 

Un petit tour et puis s'en vont. 

Elle lui balancerait out, son immaturité, ses goûts si pauvres, son addiction. 

Elle n'avait rien à perdre, elle n'irait pas de main-morte. 

Elle balancerait le magret, un grand cru cette fois, 

foutrait les pieds dans le plat.

Et lui ferait de même, l'attitude du gars,

A qui ça ne fait ni chaud ni froid... Un peu rockeur, un peu gangsta. 

Elle l'imaginait déjà de là, 

Dans son fauteuil de bureau lui servant d'espèce de rock'in chair, 

La mine désabusée, à moitié granuleuse de la nuit passée, 

Le sourire de travers. 

Cela ne l'empêcherait en rien de retourner dans les jupons de sa dulcinée, la poudre blanche, 

Dormeur de la vie, les mains sur les hanches.