Il aimait cela, jouer aux dès avec les relations humaines. Quelque chose d'excitant, une sorte d'anthropologie de comptoir, pour son âme en peine. A priori, il avait parfaitement cerné ce nouvel employeur, de ses yeux de lynx, ceux qui s'attardent sur les plus petits détails d'une tenue, d'un haussement de ton, d'une ride sur le front. Il était jeune et ambitieux, avait monté sa start-up tout de suite après avoir décroché haut-la-main le master qui lui permettrait bientôt de décrocher n'importe quel contrat dans l'immobilier, pourvu que la fougue perdure dans sa caboche de winner un peu à l'américaine. 

A ses yeux, cet homme là n'était qu'une énième bête de travail sur le terrain de jeu capitaliste. Une intelligence à l'entêtement redoutable, t ceci dépassait de loin tous les enjeux d'argent que l'on pouvait se représenter en pensant au milieu de l'immobilier. Ceci n'était ni plus ni moins qu'une question de fierté, avoir un objectif et s'y tenir, pour relever le challenge, celui de demain et celui d'après-après demain. 

"Le travail, c'est la santé." Voici son crédo. Le travail pour le travail et la réussite sans partage. 20 minutes après son entrée dans les locaux de la société, il pensait déjà avoir fait le tour de ce personnage, avide de conquérir de nouveaux territoires de marché, ce bourreau du Monopoly grandeur nature. Il pensait cela, mais, un tantinet joueur, il laissa tout de même éclater cette phrase durant l'entretien d'embauche, pour susciter cette réaction qu'il n'aurait jamais soupçonné :"Il n'avait aucun diplôme, s'était formé tout seul de a A à Z, un autodidacte, aucun background à faire valoir sur la table, si ce n'est le fruit de ses créations et de ses expériences..." Et c'est à cet instant que le regard du jeune loup de l'immobilier s'illumina.