Par delà la conjugaison, la structure des phrases et même un parler naturel, c'est évidemment de la sensibilité d'une langue dont il est question lorsque l'on veut apprendre une langue.
Apprendre une langue... Mais est-il réellement question d'apprentissage ? Cognitivement parlant, oui, un certain nombre de réflexes sont intégrés à l'écosystème existant, réflexes de sens, réflexes grammaticaux. Mais qu'en est-il des réflexes interfaciaux ? Ceux qui se situent à la frontière entre le conceptuel et le sensitif ?
La sensibilité d'une langue est son cœur, et à l'instar d'une ruche, c'est là où il y fait le plus chaud. Cette chaleur renvoie à ce qui se trouve de plus informel dans une langue. Éprouver cette sensibilité ne demande pas seulement du travail et de la compréhension, mais encore de l'acuité esthétique, celle qui peut faire entrevoir la singularité d'une langue et le caractère irremplaçable de la connotation d'un mot ou d'une expression. "Expression"... Voilà l'implicite-même !
Pris dans les fluctuations codifiées d'un écosystème social et langagier, jamais aucun mot à un instant T ne saurait être coloré de la même façon qu'un autre, onde d'un champ quantique.
Nous ne pouvons résolument pas cloisonner signifiant et signifié. C'est qu'entre les deux existe une zone tampon, une zone aqueuse où ils se confondent dans l'implicite du dessin mental. Et c'est au sein de ce dessin mental que se joue le dessein de la respiration naturelle d'une langue, celle n'ayant plus besoin d'être traduite pour être ressentie. Par delà les codes utiles, c'est d'un certain ton narratif dont nous parlons ici.