Ils étaient trois larrons.
Trois larrons à lui tourner autour,
Ils étaient trois bourdons,
Trois bourdons filant dare dare vers une nouvelle conquête,
A se mettre sous la dent.
Une nouvelle jupette,
Ah ça ils en étaient adeptes,
La vérité si j'mens !
Trois larrons qui en dépit de leur âge avancé,
Avaient encore le regard qui brillait,
Une voix suave, un zeste de douceur,
Deux grammes d'intelligence et de pudeur,
Et ils fondaient comme neige au soleil.
Il faut dire que les hormones savent bien vous donner l'étincelle !
Elle les avaient convié tout trois chez elle,
Trois pour le prix d'un, en voilà une belle occasion !
Et tout trois croyant dur comme fer à une invitation,
Ne comprenaient pas encore qu'il assisteraient à leur propre dîner de cons.
Alice ouvrit doucement la porte d'entrée. Ce fut d'abord Michel qui se présenta. Méditérranéen, le teint délicatement tanné et des cheveux épais. Un crooner, professeur de chant qui escomptait bien, de par son charme indélébile (il avait 60 ans passés) se mettre la petite dans la poche. (et dans le lit) Il prit place dans le minuscule studio d'Alice sans se faire prier. La place d'honneur lui revenait, celle du lit, un petit lit proportionnel au studio de 15m2, en définitive. Un studio d'étudiants, quoi ! A vrai dire, il ne comprenait pas bien ce qu'il foutait là, mais en si bonne compagnie, même un grenier aurait fait l'affaire, n'est-ce pas ?
Ce fut alors au tour de Richard de débarquer. Amateur de poker, il avait plus fière allure encore avec sa veste de cuir, sa Rolex et ses... Non mais attendez un peu ! Mais qui est ce mec assis sur le lit pour enfants en train de le regarder de haut en bas ?
Richard pensait être seul, seul avec la jeune Alice, il s'y voyait déjà, en haut de l'affiche, comme à Végas, là où tout est plus grand que dans ces casinos miteux de bord de plages françaises. Et voilà que ce mec, cette vieille croûte, venait gâcher son date ! Non mais qu'est-ce qu'il foutait là ?
Les deux hommes se regardèrent. Pas en chiens de faillance mais ils s'étudièrent un instant, comme pour essayer de comprendre leur rôle exact dans ce qui avait l'air de tourner à la mauvaise pièce de théâtre... Pièce dont ils semblaient être les personnages principaux... Sans même en avoir été mis au courant !
Il s'échangèrent un sourire cordial mais n'urent pas le temps d'aller plus loin car bientôt, ils furent interrompus par Florian, qui frappa à la porte d'entrée. (De toute façon, il n'y en avait pas d'autre.) Ce dernier était le plus jeune des trois, et le plus humble aussi, mais cela ne l'empêcha pas d'afficher une mine défaite à la vue de ses deux autres congénères, comprenant bien que la soirée romantique qu'il s'était mis en tête de passer avec Alice n'était plus vraiment d'actualité... Florian pénétra dans la pièce qui servait de hall d'entrée, mais aussi de cuisine, de chambre à coucher et de salon. Il jauga les deux homme silencieux assis l'un à côté de l'autre sur le lit qui faisait office de canapé. On sentait déjà l'odeur du couscous végétarien se répandre dans l'habitacle. Pour tout dire, il n'était pas d'humeur à jouer à la dînette. Et encore moins à partager le plat du jour (Alice) avec ces individus dont il ne connaissait pas même le nom ! Les partouzes, très peu pour lui. Mais à quoi jouait-elle, cette Alice ?
Il pris l'apéritif sur la table qui servait de table à manger et de bureau et prétexta qu'il ne se sentait pas bien pour rentrer. (Ce qui n'était pas complètement faux, au demeurant)
Quant à Michel, une fois le dessert englouti, il eut étrangement sommeil et dû regagner ses pénates. Alice s'empressa de faire le même coup à Richard -qui, un soupçon orgeuilleux, pensait qu'il aurait droit à un traitement d efaveur- et le fouta pour ainsi dire presque dehors. Le tour était joué !