Chers petits Nenfants,

Je vous écris depuis ce magnifique village où l'on m'a fait élire domicile... Eh oui ! Plus d'un demi-siècle que je vis au milieu des sucres d'orge géants en plastique et de la neige synthétique qui recouvre ma chaumière en carton-pâte... Heureusement que j'ai la vie (presque) éternelle et que mon contrat avec Coca-cola et Disney se termine bientôt, c'est moi qui vous le dis ! 

Honnêtement, même si je commence à en avoir plein le cul de ce décor un peu kitch, après 50 ans de bons et loyaux services au système capitaliste, mes elfes et moi n'avons pas trop à nous plaindre... Répondre à vos innombrables lettres de complaintes et perpétuer la légende de mon existence fantasmagorique (oui parce que c'est vrai que c'est du boulot, vous croyez de moins en moins en moi !) pour le salaire que j'touche, c'est pas trop demander ! 

Parfois, je me dis que j'ai vraiment les boules que mon traîneau se soit crashé sur la Terre... M'enlevant ainsi d'une planète où tout ne tournait pas autour de légo, de l'image et du fric... Et puis je me dis qu'après tout, j'aurais pu tomber plus mal que sur votre espèce. Au moins, vous savez ce que c'est que la bonne bouffe ici, pas vrai ? Alors à défaut de remplir mon coeur de joie, je remplis mon estomac. En attendant qu'un beau jour, peut-être, une fée ou un gnome vienne me délivrer de ce merdier... 

Non, mes chers enfants gâtés-pourris, vos complaintes ne sont rien à côté du destin funeste qui m'a frappé il y a un peu plus d'un siècle maintenant, lorsque ce putain de renne s'est trompé de ligne de temps et a échoué au Groenland... C'est le nom que vous avez donné à ce bloc de glace, si je me souviens bien ? 

Mais lorsque je pense aux enfants condamnés à extraire des métaux rares pour que vous puissiez jouer à Candy-crush, je me dis que ça relativise un peu. 

Le Papa Noël