Avenue de la Gloire, Toulouse, un mercredi matin.

On hume l'humidité, le nez dans le ciel poudré, 

Sur lequel les deux obélisques du cimetière se détachent. 

Elles montent la garde dans la brume un peu glacée. 

6, 7 danseurs aux bras et aux jambes affutés dispatchés,

Danseurs de l'éphémère, danseurs d'une matinée,

Deuseurs de danse moderne et expérimentale, 

Dans la lumière automnale poudrée,

Procèdent sur leurs feuilles à l'échauffement verbal, 

Griffonnant des poèmes sur un banc, à cheval...

Avant la performance magistrale, 

Pour laquelle il se sont réunis ce matin,

Devant ces Messieurs dames, 

Dans le Toulouse matinal, 

Bouffée de vitalité !

Magie des toiles d'araignées givrées, 

Dédale d'étoiles, dentelle végétale, 

Eparpillée !


Au milieu des cicatrices du bitume, 

Et des zigzags des voitures,

Ils danseront tout bientôt. 

Expérimenteront leurs corps, ses trémolos.

Ils danseront au milieu des équipements urbains, 

Ils danseront, mais jamais, jamais en vain !


Car il y aura bien toujours un écureuil pour les regarder, 

Ou des cris d'oiseaux téméraires, 

Pour ponctuer leurs déplacements, 

Narrer leur caractère extravageant... 


Bientôt ils danseront au milieu de la rue, 

Lèveront les bras au ciel, sauteront à cloche-pied, 

Toutes ces choses saugrenues,

Sous les regards curieux, las ou interrogateurs, 

Des passants qui passent leur chemin, 

Ou des gens qui font vrombir leur moteur, 

Avant de s'en repartir, loin... 

Loin de cette bulle artistique, décrétée ce matin. 

C'est au 2, avenue de la Gloire, en face du cimetière, 

Qu'ils serpentent ensemble la rue, comme des frères. 

Ce sont les compères du mercredi matin, 

Les danseurs de l'éphémère. 


Aujourd'hui encore, ils ont eu cette idée un peu folle, 

A même la rue,

De danser, de courir, et même de s'asseoir

Au milieu des feuilles d'automne, 

Tâches de rousseurs piquetant le troitoir, 

Dentelle végétale pour de drôles d'animal, 

Jettant quelques mots sur le papier, 

Avant d'offrir leur carnaval, 

A ceux qui daigneront, juste un instant, le regard, détourner. 

Ils ne font pas l'aumone, ne demandent ni argent, ni charité. 

Ils ne demandent en fait rien, et donnent tout en retour,

Contre la privatisation de l'espace public, c'est leur façon de protester, 

Au détour d'une rue, d'un carrefour, 

La place aux baisers volés !