Mélomé avait toujours été méchant. Méchant avec ses parents, méchant avec sa grande soeur et méchant avec son ours en peluche qu'il câlinait autant qu'il martyrisait lorsque quelques soudaines envies de violence sévissaient sur son petit être encore innocent. Oui, Mélomé était méchant tout simplement à cause de ces murmures qui résonnaient de façon incessante dans sa tête, lui intimant l'ordre de faire ceci ou de dire cela. Selon les dires du petit garçon, il n'était pas tout seul dans sa tête, si bien qu'il pouvait être tendre avec son papa à midi et d'une froideur absolue avec ses camarades de classe à 14h, lorsque venait le temps de l'après-midi à l'école de Madame Nicole.
Il suffisait d'une broutille, d'un pêt de mouche pour que soudainement Mélomé parte en cacahuettes et c'est ainsi qu'un beau jour, après avoir crevé un oeil à son ours fétiche, il entrepris de le faire avec son voisin d'à côté car il avait refusé de lui prêter son compas, et la pointe de ce dernier se retrouva donc dans la pupille dilatée par la peur de son camarade.
Cela valu donc au petit garçon, trop petit pour aller en prison, un séjour dans un des instituts les plus renommés de la région en matière de psychopathie. On le fit enfermer dans une cellule capitonnée avec autorisation tout de même de se délecter de ses bonbons Haribo préférés.
Il se trouve que le petit garçon ne souffrit pas plus que cela de la solitude, affirmant même qu'il préférait sa propre compagnie et qu'elle lui suffisait à vrai dire amplement. Cette solitude précieuse lui permettant d'ailleurs de pouvoir faire suffisamment le vide dans sa tête pour faire abstraction de ces méchantes voix qui lui prescrivaient toujours les pires choses à faire. Il pouvait ainsi réchauffer son petit coeur, n'écoutant que les gentilles voix, toujours plus discrètes et ne s'imposant jamais à qui que ce soit. Elles qui avaient toujours les solutions aux équations mathématiques qu'il visualisait en rêves, lorsque comme il le disait, "mon esprit est libre de mon corps".
C'est ainsi que le petit garçon devint un grand garçon, puis un plus grand encore, puis il devint vieux, dans cette cellule capitonnée dont il ne sortait que pour admirer selon ses dires "les chatoiements de la réverbération du soleil sur la matière aux molécules faiblement liées", comprenez le reflet du soleil sur l'eau. Et c'est ainsi que depuis sa chère cellule capitonnée il perça le mystère de la matière noire.