Ce rapport intéressé, utilitaire au travail, à la vie, à la nature, à l'art, à chaque pan de l'existence ; ce rapport mercantile qui les évide de leur finalité en soi et ainsi de leur sens au fur et à mesure qu'il se les approprie provient également de cette dichotomie originelle instituée par la religion monothéiste entre l'homme et sa raison d'être. 

La religion, en considérant Dieu comme une entité transcendante, a institué une barrière anthropocentrique entre l'homme et l
e reste de l'univers. Elle a relégué la conscience de cette interconnexion quantique entre toute chose dans les confins de l'oubli du paganisme et des sociétés traditionnelles ou primitives, comme le disent certains avec un mépris proprement occidental.
La dimension immanente de Dieu avec le fait que chaque fragment de l'univers le compose, a été amputée. Le sens et le sort de ce dernier seraient ainsi à remettre entre les mains de cette entité, (La main invisible du marché) se rappelant à nous de temps à autre pour nous châtier ou nous gratifier d'un miracle. Le monde matériel, quant à lui, en tant que création extérieure par le divin, serait vain, (Plotin) et c'est précisément en cela qu'il ne mérite pas plus que d'en être réduit au statut de marchandise, à défaut de receler le salut.


En plus du manichéisme, du cynisme assumé et de la déresponsabilisation de soi que cela implique, la valeur du monde est niée au profit d'un espoir qui serait toujours à aller chercher dans un après, dans un ailleurs que Nietzsche décrit avec raison comme morbide. Non pas parce que cette recherche de salut implique la mort physique, mais parce que si l'ici et maintenant sont vains, alors toute l'immensité, la beauté et la cohérence de l'univers sont eux aussi précipités dans l'abîme du non-sens par voie de conséquence...